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Léonard, la passion dans une vie.

Chapitre 1
L'invitation

Il était grand, athlétique, beau et jeune, une chevelure légèrement ondulée châtain foncé avec une mèche partant de la droite pour venir couvrir le haut de son front.
Il avait des petits yeux verts pétillants, un nez droit, une bouche fine aux lèvres rieuses, une moustache fine et coquette agrémentant son large menton en accord avec des pommettes saillantes…De larges épaules musclées imposantes et rassurantes, toujours mises en valeur dans son costume du dimanche au col amidonné dissimulant son cou derrière une cravate sombre cachée par un gilet aux multiples boutons recouverts d'une veste où se trouve un mouchoir blanc sur la gauche de son torse.
De ce costume morne et austère jaillit un pantalon de coupe droite, terminant par des souliers cirés.
Voilà comment on pouvait l'apercevoir le dimanche matin à l'église de Beaumont-sur-Oise en ce début de juin 1914.
Accompagné de ses parents, de ses frères et soeurs, il était l'aîné d'une fraternité de six enfants.
Marié à la hâte, il n'y a pas tout à fait deux ans, d'une rencontre lors d'une kermesse de la paroisse trois ans auparavant, sa femme, Désirée était une modeste et agile couturière, élégante, à la taille fine, toujours à la dernière mode, coquette, avec des robes colorées, épousant les formes de sa taille dessinées par un corset rigoureux.
Sa coiffure à la mode de la belle époque, un joli chignon, sobre et élégant, une raie sur la droite de son front pour séparer sa chevelure châtain claire, soyeuse, toujours agrémentée d'un chapeau assorti à sa tenue.
Après la messe, le repas dominical au domicile des parents de Léonard, avec l'ensemble de la fraterie était leurs habitudes.
Léonard avait trois frères, tous étaient déjà en âge de gagner leur vie, ils aidaient leurs parents, qui étaient de modestes personnes déclassées depuis la guerre de 1870, ou leur famille furent durement éprouvés par les dévastations de l'armée prussienne, l'épicerie familiale de Léonard père fut entièrement détruite, plongeant ses propres parents dans un déclassement, obligeant leurs filles à se cloîtrer aux couvents pour ne pas avoir la honte de ne pouvoir les doter pour des mariages intéressants. Seul Leonard père eut l'autorisation de se marier, par son frère, qui était prêtre, ayant recueilli ses propres parents ruinés, vivant dans des presbytères au gré des paroisses où il officiait.
Depuis la mort de leurs parents quelques années auparavant, Léonard père et son frère étaient restés très proches.
Les dimanches après-midi, la famille allait lui rendre visite dans la petite ville d'à côté, après le repas.
Après avoir célébré les vêpres, la confession était de rigueur.
Quant aux trois soeurs de Léonard fils, mineurs, elle ne travaillait pas encore, mais tenait la maison sous l'oeil de leur mère Marie.
C'était une femme austère peu encline aux états d'âme, mariée, elle-même à la hâte, quittant une peine de coeur, dont l'union étant impossible pour une différence de classe sociale.
Elle se présenta au curé de sa paroisse pour lui trouver un mari, Léonard père s'étant lui-même fait connaître, le prêtre décida de les présenter.
La réponse cinglante et glaciale de Marie ne se fit pas attendre et répondit au prêtre qui le lui présenta « celui-ci ou un autre, qu'importe! ».
Ils se marièrent le mois suivant, sous contrat devant notaire, avec un vouvoiement distancié imposé par Marie.
Elle n'avait aucun amour pour lui, mais elle aimait profondément ses enfants.
Elle fut exigeante dès le départ envers Désirée.
C'était une bonne épouse, travailleuse, tenant avec rigueur leur modeste foyer de deux pièces, dans un petit immeuble de deux étages, où leur fenêtre de cuisine donnait sur une petite cour commune où les femmes faisaient leurs lessives et étendaient leurs linges.
La chambre donnait, quant à elle, sur la rue.
La semaine du lundi au samedi, Léonard travaillait comme jardinier, comme son père, dans de riches propriétés auprès de notables de la ville.
Après son travail, en soirée, il allait travailler la terre, dans un potager ouvrier où il aimait se réfugier et discuter avec les autres jardiniers.
Il recevait de nombreuses lettres, entre-temps, dans cette vie routinière et rythmée par les saisons, de Louis, son copain, qu'il avait connu à Rouen, pendant son service militaire, avec lequel il entretenait une forte amitié.
Louis et Léonard entretenaient une relation épistolaire plutôt intense.
Il y avait entre eux une attirance, ils étalèrent par écrit tous les deux leurs confidences intimes sur leurs vies respectives, évoquant également leurs souvenirs communs durant la période militaire.
Ils décidèrent de se revoir, en passant du temps ensemble le samedi.
Louis lui proposa de venir le rejoindre dans une propriété se trouvant en campagne près de Forges-les-Eaux, où il y avait un étang dont il avait la charge, appartenant à un vicomte vivant à Paris.
L'endroit n'étant que très peu fréquenté par ce dernier, Louis pouvait allègrement y passer ses dimanches après-Midi en compagnie de son épouse pour pique-niquer.
Le coeur de Léonard frémit à l'idée de le retrouver.
Cette amitié, masculine, forte et profonde, cachait sans doute une attirance profonde et particulière entre ces deux jeunes hommes fraîchement mariés.
Louis écrivait régulièrement à son ami, ne lui cachant pas la déception et l'ennui que le mariage lui procurait.
Son épouse, Henriette, très jolie, très sage, élégante, ne l'inspirait pas…
Il lui écrivait souvent : « Je préférerais passer du temps avec toi, et que nous parlions de nos souvenirs de régiment… »
Léonard sentait cette irrésistible envie de le revoir, il ne comprenait pas ce sentiment particulier qu'il ressentait…L'image du torse nu de Louis qu'il avait vu les soirs dans leurs chambres communes pendant leurs services lui revenait sans cesse.
Louis faisait 1m70, il était fin, athlétique, imberbe, une chevelure bouclée, blonde avec une moustache fine, un regard taquin, accompagné de grands yeux bleus.
Il était lui aussi jardinier…il avait en commun la passion de leurs métiers.
Il y avait également de sa part cette attirance, la non-compréhension des sentiments qui les unissaient, tous deux mariés à de gentilles épouses, fidèles, aimantes, qui tenaient bien leurs foyers.
mais les deux confidents s'aimaient profondément sans se le dire.
De leurs lettres respectives, une fois reçues, chacun de leur côté, sans se l'avouer, ils passèrent plusieurs fois par jour à les relire, en espérant la prochaine rapidement.
Ils savaient tous les deux que leurs amitiés étaient particulières, et que personne dans leurs entourages ne comprendrait cela.
Léonard lui écrivit :

Mon Cher Louis,

Je te remercie pour ton invitation et je t'annonce que je viendrai ce samedi te rejoindre en milieu de matinée, afin de tu me fasses découvrir ce lieu magnifique dont tu me parles si souvent.
Je repartirai ensuite en fin d'après-midi.
J'ai hâte de te revoir et que nous échangions, sur notre amitié.

Je t'embrasse.

Ton ami fidèle

Léonard

Aussitôt rédigé, il posta le courrier lui-même, ne voulant pas que Désirée se rende compte de son engouement pour Louis.
Trois jours plus tard, la réponse de Louis fut quant à elle époustouflante :

Mon cher ami,

Je m'impatiente vivement de nos retrouvailles, je me languis de t'entendre me raconter ta nouvelle vie.
Je serai à ton écoute, désirant vraiment te voir fréquemment, en espérant que notre petit arrangement fonctionne.

Ton fidèle et tendre ami

Louis

Ps : Je viendrai te chercher à la gare de Forges-les-Eaux en milieu de matinée, comme tu me l'as écrit dans ta lettre précédente.

À la lecture et relecture de la lettre, le coeur de Léonard s'emballa.
Une sensation vertigineuse incompréhensible l'envahit, il comprit à l'instant qu'il était amoureux de Louis, et que cet amour était réciproque, ces mots en étant la preuve.
Il fut profondément troublé, en érection constante à l'idée de le revoir.
Le samedi suivant, de bonne heure, il se leva, il prit son café, avec ses tartines beurrées avec soin, par Désirée, il s'aspergea d'eau de Cologne, achetée chez son coiffeur parfumeur Zeinner, se trouvant à l'entrée de la ville au bord de l'Oise. Il partit à la hâte, vers la gare, se trouvant de l'autre côté du pont dans la petite ville voisine.
Après avoir pris son ticket, auprès du guichet, il s'installa, dans un wagon du train, sur une banquette de bois, en seconde classe.
Le chef de gare siffla le départ, la locomotive à vapeur démarra, en direction de Paris.
Il se remémora tous les bons moments passés, les lettres écrites, il savait à présent qu'il aimait son ami comme un homme aime une femme…
Il avait compris aussi que Louis l'aimait et que cette invitation était une déclaration équivoque d'amour.
À présent, il ferait tout pour être avec lui le plus souvent possible…

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Dernière réponse le 16 juin
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40 • hypersensible
339 km • Passif
a publié ce sujet le 11 juin
BMPLDIR
66 • BMPLDIR
Une nouvelle aventure que l'on a plaisir à lire...
Le 12 juin
40 • hypersensible
Merci😊 • Le 12 juin
Gaynat
64 • Gaynat
Cc . Tu es très prolifique et c'est vraiment merveilleux pour nous lecteurs .... Ça va être délicieusement bon de suivre ces nouveaux personnages dans leurs amours réciproques. Bravo à toi
Le 12 juin
40 • hypersensible
Merci beaucoup à toi c'est très gentil😊 • Le 12 juin
Gaynat
64 • Gaynat
Cc . Tu es très prolifique et c'est vraiment merveilleux pour nous lecteurs .... Ça va être délicieusement bon de suivre ces nouveaux personnages dans leurs amours réciproques. Bravo à toi
Le 12 juin
Thomas58300
62 • Thomas58300
Une nouvelle histoire qui promet d'être croustillante, comme toutes celles que tu as déjà ecrites.
Merci
Lundi
40 • hypersensible
Merci pour ta fidélité à mes écrits 😊 le chapitre 2 est en ligne, le 3 est en cour d'écriture…😉😘 • Lundi
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